Les minéraux dans les arts et les enluminures du Moyen-Âge à la Renaissance

Qu’il s’agisse de peintures, d’enluminures ou de vitraux, le Moyen-Âge fait une large place à l’utilisation des minéraux que l’on retrouve en abondance dans les monuments religieux.

Bitume solide
Bitume sur calcaire

Utilisation des minéraux en peinture décorative et artistique

Au Moyen-Âge, la décoration des manuscrits, des églises et des demeures civiles fait appel à une gamme très large de pigments et de minéraux naturels. La peinture à fresque d’abord sur enduit ou sur bois puis sur toile, à partir d’eau ou d’huile et de pigments prend un essor considérable. Le tableau comme élément pour la dévotion, tout comme le portrait et le décor privé se renforce encore à la Renaissance.

Les pigments de base sont toujours utilisés. Les ocres, le blanc de plomb et certains pigments jaunes toxiques comme l’orpiment (As2S3) en font partie, ainsi que tous les minéraux broyés et dont la poudre est blanche (quartz (SiO2), calcite (CaCO3), gypse (CaSO4.2H2O) et barytine (BaSO4)).

Il en est de même pour le rouge à partir du réalgar (As4S4) jusqu’au XVIIe siècle et le brun bitumineux (produits organiques naturels issus du pétrole), très utilisé jusqu’au XIXème siècle.

Le bleu outremer, qui contient de la lazurite (Na,Ca)8(AlSiO4)6(SO4,S,Cl,OH)2, de la pyrite (FeS2) et de la calcite (CaCO3), est utilisé surtout au Moyen-Âge pour l’enluminure et la peinture de prestige. L’azurite (Cu3(CO3)2(OH)2) beaucoup moins onéreux que l’outremer, est très utilisée jusqu’au XVIIIème siècle. Mais, avec l’humidité, ce bleu s’altère en malachite (Cu2CO3(OH)2) et vire au vert. Les artisans continuent d’utiliser un verre au potassium et au cobalt, appelé le smalt jusqu’au XIXème siècle. Il est fabriqué avec de la skuttérudite ((Co,Ni)As3-x), découverte en 1845 à Skutterud (Norvège), mais aussi à Chessy et à Sainte-Marie-aux-Mines (France).

Les verts traditionnels sont issus de la malachite et des terres vertes riches en argile comme la glauconite (K,Na)(Fe3+,Al,Mg)2(Si,Al)4O10(OH)2 ou la céladonite K(Mg,Fe2+)Fe3+(Si4O10)(OH)2. Il est aussi possible d’obtenir du vert en mélangeant des pigments bleu et jaune. Le jaune est appliqué en glacis (voile coloré transparent) sur le bleu. Mais les jaunes organiques ou minéraux restent fragiles (sensibles à la lumière ou à l’air), et seul le bleu demeure à la place du vert initial. C’est le cas dans le tableau de Vermeer « la Ruelle ». Ainsi, le jaune de plomb et d’étain appliqué en glacis sur le bleu outremer pour le vert de la verdure est maintenant en partie dégradé et le vert a viré au bleu-gris.

Enluminure du livre de chasse de Gaston Phébus, BNF.

Les enluminures au Moyen-Âge

Les premiers manuscrits enluminés datent de l’Egypte pharaonique. Ils sont présents sur papyrus, puis sur parchemin au Moyen-Âge.

A cette époque, les moines utilisent l’enluminure pour illustrer un manuscrit. C’est un décor dessiné, peint, et souvent relevé de feuilles d’or ou d’argent ayant aussi un rôle d’illustration du texte. Des moines les réalisent faisant du manuscrit un objet rare et précieux.

Les couleurs peuvent être obtenues à partir de végétaux, mais aussi à partir de minéraux : azurite Cu3(CO3)2(OH)2, chrysocolle–lapis-lazuli Cu2-xAlx(H2-xSi2O5)(OH)4 · nH2O, malachite Cu2(CO3)(OH)2, cinabre HgS, orpiment As2S3, réalgar As4S4, hématite Fe2O3 mais aussi feuilles d’or et d’argent.

Notre-Dame de la Belle Verrière (1ère moitié du XIIe siècle).

Le verre et les vitraux

Le verre est un matériau solide, amorphe (non cristallisé) qui s’obtient à haute température par fusion de quartz en présence de fondants (produits ajoutés qui permettent d’abaisser la température de chauffe pour obtenir du verre liquide) et de colorants.

Les premiers verres sont fabriqués par l’Homme vers 3000 av. J.-C. A cette époque, ils sont opalescents, avec une couleur verte ou bleue. Ils permettent de fabriquer des vases et divers flacons.

Connu depuis l’Antiquité, le vitrail se développe surtout au Moyen-Âge pour l’enseignement religieux. Il est déjà présent dans des basiliques paléochrétiennes, qui sont les monuments les plus anciens de l’architecture chrétienne de l’époque de l’Antiquité tardive et de l’Empire romain.

Le vitrail est un assemblage de morceaux de verre transparent, blanc ou coloré avec la possibilité de peindre le décor. L’assemblage est serti dans un cadre rigide (bois, plâtre, métal). Depuis le Xème siècle, le sertissage se fait avec du plomb fondu. Pour le tracé des contours et des traits de personnage, les artisans utilisent un mélange liquide fait d’oxyde de fer ou de cuivre, de verre broyé et de vinaigre. Le tout est peint sur le vitrail avant la cuisson : c’est la technique de la grisaille, utilisée depuis le XIIème siècle.

La production d’un vitrail implique l’utilisation de sable pour le verre, d’oxydes métalliques pour les motifs et couleurs et de végétaux pour le fondant.

Le sable utilisé est constitué de grains de quartz. De la chaux (CaO), de la potasse (KCl) ou de la soude (NaOH) sont ajoutées pour abaisser son point de fusion. Ces composants sont issus des cendres de plantes riches en potassium ou sodium et calcium (salicorne, hêtre, fougère).

La coloration du verre est obtenue en ajoutant un peu d’oxydes métalliques pendant la fusion. L’oxyde de cobalt est utilisé pour le bleu, l’oxyde de cuivre pour le vert ou le rouge, les oxydes de fer pour le jaune et l’oxyde de manganèse pour le pourpre et le jaune.

Dessus de table en marqueterie de pierres dures du XVIIe siècle

La marqueterie de pierres dures

Même si la mosaïque existe depuis l’Antiquité, la technique de marqueterie de pierres dures, reprise à Florence à la fin du XVIIème siècle est toujours employée de nos jours. Elle comprend quatre étapes, le débit des pierres, le découpage des éléments, l’assemblage et le collage et enfin le polissage. Les sols, les murs ou encore les dessus de table sont recouverts de mosaïques de pierres dures taillées et assemblées avec précision.

Les pierres comme le lapis-lazuli, la malachite, le jaspe, l’agate et les marbres sont choisies pour leurs propriétés esthétiques, comme leur veinure, leur opacité, leur brillant ainsi que pour leur couleur.